Accident nocturne Modiano, Patrick
"Quelle structure familiale avez-vous connue ? J'avais répondu : aucune. Gardez-vous une image forte de votre père et de votre mère ? J'avais répondu : nébuleuse. Vous jugez-vous comme un bon fils (ou fille) ? Je n'ai jamais été un fils. Dans les études que vous avez entreprises, cherchez-vous à conserver l'estime de vos parents et à vous conformer à votre milieu social ? Pas d'études. Pas de parents. Pas de milieu social. Préférez-vous faire la révolution ou contempler un beau paysage ? Contempler un beau paysage. Que préférez-vous ? La profondeur du tourment ou la légèreté du bonheur ? La légèreté du bonheur. Voulez-vous changer la vie ou bien retrouver une harmonie perdue ? Retrouver une harmonie perdue."
Chien de printemps Modiano, Patrick
Avril 1992, en déambulant du côté de l'Observatoire, le narrateur se souvient de Francis Jansen, rencontré en avril 1964 dans un café de Denfert-Rochereau. Jansen, un être mystérieux, photographe de talent, revenu de tout et prêt au départ. Le narrateur décide de dresser l'inventaire de vingt-cinq années de photos. Le fol hasard de la vie entremêle alors les vivants et les morts.
Dans le café de la jeunesse perdue Modiano, Patrick
Patrick Modiano laisse ressurgir les fragments d’un monde révolu, celui du Paris des années 60, ses devantures désormais ensevelies et ses ruelles fantômes, peuplées des figures fugitives, toujours en partance. Variation subtile et lumineuse sur le mystère humain, Dans le café de la jeunesse perdue allie l’acuité poétique à la sobriété de l’écriture. À chacun de ses livres, Modiano renoue avec le fil d’une recherche ténue et obsédante. Une tentative sublime de restitution et de scellement du passé, situé à la lisière de l’oubli et du dicible, et que reflète avec force cette nouvelle œuvre, autant sinon plus que ses plus beaux récits. En exergue, comme au seuil d’un texte hanté par l’absence, par l’évanouissement subreptice des êtres et des lieux, siège une citation de Guy Debord à laquelle le roman emprunte son titre : « À la moitié du chemin de la vraie vie, nous étions environnés d’une sombre mélancolie, qu’ont exprimée tant de mots railleurs et tristes, dans le café de la jeunesse perdue ».
Dimanches d'août Modiano, Patrick
Pourquoi le narrateur a-t-il fui les bords de la Marne avec Sylvia pour se cacher à Nice ? D'où vient le diamant la Croix du Sud, la seule chose dure et consistante de leur vie et qui, peut-être, leur porte malheur ? De quoi est mort l'acteur populaire Aimos ? Qui sont les Neal, et pourquoi, de leur villa délabrée, s'intéressent-ils de si près à Sylvia, au narrateur, à la Croix du Sud ? Et Sylvia ? A-t-elle été l'épouse de Villecourt ? Et Villecourt ? Que vient-il faire à Nice, lui aussi, à l'heure de sa déchéance ?... À travers toutes ces énigmes qui s'entrecroisent, un roman d'amour se dessine, empreint d'un charme qui hante le lecteur pendant longtemps.
Fleurs de ruine Modiano, Patrick
24 avril 1933. Deux jeunes époux se suicident dans leur appartement parisien pour de mystérieuses raisons. Cette nuit-là ils auraient fait la connaissance de deux femmes et deux hommes, fréquenté un dancing, pénétré dans une maison pourvue d'un ascenseur rouge. Trente ans se sont écoulés. Le narrateur s'interroge sur leur histoire dont certains protagonistes semblent avoir croisé la sienne. Interrogation qui, en écho, en suscite d'autres. Fantômes entrevus, explications jamais venues. Silhouettes, prénoms aspirés par le temps. Paris, aussi, surtout. Perdu, poursuivi, redessiné.
La petite Bijou Modiano, Patrick
C'est peut-être cela l'enfer : "Hanter les couloirs du métro pour l'éternité avec un manteau jaune." Mais en châtiment de quelle faute ? Cette femme en jaune que la narratrice croise un jour au métro Châtelet et en qui elle reconnaît sa mère, de quoi est-elle coupable ? D'avoir menti ? On la croyait morte au Maroc et elle vivrait à Paris ? D'avoir abandonné sa fille, celle qu'on appelait la Petite Bijou, au temps où elle rêvait de faire carrière dans le spectacle ? Seuls les noms propres permettraient peut-être de retracer le passé, de savoir qui était vraiment cette femme énigmatique : Suzanne Cardères, selon l'état civil ou la comtesse Sonia O'Dauyé du temps de ses rêves de grandeur, ou La Boche après la guerre quand elle dut s'enfuir au Maroc pour ne pas être tondue ou encore Trompe-la-Mort alors qu'elle survit misérablement dans un coin de la banlieue parisienne ?Le dernier Modiano est un roman policier mélancolique sans coupables où il n'y a que des victimes, personnages en déréliction comme cette Petite Bijou qui ne parvient pas à se remettre d'une enfance sans père, sans même l'amour d'une mère, de toutes ces blessures que la vie quotidienne ne fait que raviver. Et qui n'a pour toute consolation que la musique des mots, le nom d'un café dans le Paris des années cinquante, un poème à la radio dans une langue inconnue, le nom mystérieux d'hommes et de femmes qui s'inventent une identité pour mieux oublier leur vie sans attrait. La musique de Modiano, ce style si singulier, n'aura jamais été plus poignante que dans cette étrange balade sur les traces d'une enfance ravagée. --Yves Bellec
La place de l'étoile Modiano, Patrick
En exergue de cet étonnant récit, une histoire juive : Au mois de juin 1942, un officier allemand s'avance vers un jeune homme et lui dit : Pardon, monsieur, où se trouve la place de l'Étoile ? Le jeune homme désigne le côté gauche de sa poitrine. Voici, annoncé en quelques lignes, ce qui anime le roman : l'inguérissable blessure raciale.Le narrateur, Raphaël Schlemilovitch, est un héros hallucinatoire. À travers lui, en trajets délirants, mille existences qui pourraient être les siennes passent et repassent dans une émouvante fantasmagorie. Mille identités contradictoires le soumettent au mouvement de la folie verbale où le Juif est tantôt roi, tantôt martyr et où la tragédie la plus douloureuse se dissimule sous la bouffonnerie. Ainsi voyons-nous défiler des personnages réels ou fictifs : Maurice Sachs et Otto Abetz, Lévy-Vendôme et le docteur Louis-Ferdinand Bardamu, Brasillach et Drieu la Rochelle, Marcel Proust et les tueurs de la Gestapo française, le capitaine Dreyfus et les amiraux pétainistes, Freud, Rebecca, Hitler, Eva Braun et tant d'autres, comparables à des figures de carrousels tournant follement dans l'espace et le temps. Mais la place de l'Étoile, le livre refermé, s'inscrit au centre exact de la «capitale de la douleur.
La ronde de nuit Modiano, Patrick
Comment devenir traître, comment ne pas l'être ? C'est la question que se pose le héros du récit qui travaille en même temps pour la Gestapo française et pour un réseau de résistance. Cette quête angoissée le conduit au martyre, seule échappatoire possible. Par ce livre étonnant, tendre et cruel, Modiano tente d'exorciser le passé qu'il n'a pas vécu. Il réveille les morts et les entraîne au son d'une musique haletante, dans la plus fantastique ronde de nuit.
Les boulevards de ceinture Modiano, Patrick
Le narrateur part à la recherche de son père. Cette quête lui fait remonter le fil des années et revivre d'une façon hallucinatoire une époque qui pourrait être l'Occupation. Le voici dans un village de Seine-et-Marne, en bordure de la forêt de Fontainebleau, au milieu d'étranges individus qui viennent y passer leurs week-ends. Entre autres un « comte » de Marcheret ex-légionnaire qui souffre du paludisme, Jean Murraille, directeur de journal, sa nièce une jeune actrice blonde éternellement emmitouflée dans un manteau de fourrure... Enfin, le père du narrateur qui se fait appeler le « baron » Deyckecaire. Le narrateur s'introduit dans ce milieu interlope, en espérant atteindre son père. Celui-ci qui est-il au juste ? Trafiquant de marché noir ? Juif traqué ? Pourquoi se trouve-t-il parmi ces gens? Jusqu'au bout, le narrateur poursuivra ce père fantomatique.
Quartier perdu Modiano, Patrick
"Un dimanche de juillet, Ambrose Guise arrive à Paris. Personne. Sauf les statues. Une ville fantôme, lui semble-t-il, après un bombardement et l'exode de ses habitants. Auteur de romans policiers anglais, il vient rencontrer son éditeur japonais. Mais il va profiter de ce voyage pour élucider les mystères de son passé, du temps où il était français et s'appelait Jean Dekker, il y a vingt ans. Il fait alors surgir dans un Paris crépusculaire, halluciné, des lieux étranges : une chambre secrète rue de Courcelles, en face d'une pagode ; un grand rez-de-chaussée donnant sur un jardin, place de l'Alma. Il réveille les spectres de Georges Maillot, au volant de sa voiture blanche, de Carmen Blin, Ghita Wattier, des Hayward... Tout un quartier perdu de la mémoire est ainsi revisité, et délivre le secret de ses charmes, et de ses sortilèges."
Rue des boutiques obscures Modiano, Patrick
Qui pousse un certain Guy Roland, employé d'une agence de police privée que dirige un baron balte, à partir à la recherche d'un inconnu, disparu depuis longtemps ? Le besoin de se retrouver lui-même après des années d'amnésie ? Au cours de sa recherche, il recueille des bribes de la vie de cet homme qui était peut-être lui et à qui, de toute façon, il finit par s'identifier. Comme dans un dernier tour de manège, passent les témoins de la jeunesse de ce Pedro Mc Evoy, les seuls qui pourraient le reconnaître: Hélène Coudreuse, Fredy Howard de Luz, Gay Orlow, Dédé Wildmer, Scouffi, Rubirosa, Sonachitzé, d'autres encore, aux noms et aux passeports compliqués, qui font que ce livre pourrait être l'intrusion des âmes errantes dans le roman policier. Le titre, lié au nom d’une rue de Rome (via delle Botteghe Oscure), évoque aussi celui d’un recueil de rêves publié quelques années auparavant, en 1973, par Georges Perec.
Un cirque passe Modiano, Patrick
Place du Châtelet, elle a voulu prendre le métro. C'était l'heure de pointe. Nous nous tenions serrés près des portières. À chaque station, ceux qui descendaient nous poussaient sur le quai. Puis nous remontions dans la voiture avec les nouveaux passagers. Elle appuyait la tête contre mon épaule et elle m'a dit en souriant que personne ne pourrait nous retrouver dans cette foule À la station Gare-du-Nord, nous étions entraînés dans le flot des voyageurs qui s'écoulait vers les trains de banlieue. Nous avons traversé le hall de la gare et, dans la salle des consignes automatiques, elle a ouvert un casier et en a sorti une valise de cuir noir.Je portais la valise qui pesait assez lourd. Je me suis dit qu'elle contenait autre chose que des vêtements
Une jeunesse Modiano, Patrick
Dans un Paris où ils sont livrés à eux-mêmes, deux très jeunes gens, Odile et Louis, font l'"apprentissage de la ville" et d'une vie de hasards, d'expédients et d'aventures. Ils ont pour eux leur innocence et croisent sur leur route des individus singuliers, émouvants mais quelquefois peu recommandables qui les entraînent dans des chemins de traverse. Mais, en définitive, aussi trouble et aussi chaotique que soit un début dans la vie, il se métamorphose, avec le temps, en un beau souvenir de jeunesse, que les deux héros de ce livre sont désormais seuls à partager.
Vestiaire de l'enfance Modiano, Patrick
Quand je l'ai aperçue, assise près de la grille en fer ouvragé qui sépare le café de la salle de billard, je n'ai pas tout de suite distingué les traits de son visage. Dehors, la lumière du soleil est si forte qu'en pénétrant au Rosal, vous plongez dans le noir.La tache claire de son sac de paille. Et ses bras nus. Son visage est sorti de l'ombre. Elle ne devait pas avoir plus de vingt ans. Elle ne me prêtait aucune attention.Toute personne susceptible de nous donner d'autres détails sur ces sujets est priée de nous écrire.
Villa Triste Modiano, Patrick
Quand ils passaient la nuit à la Villa triste, Yvonne et Victor s'efforçaient de ne pas remuer du tout. Mais on sent bien que la sérénité n'était qu'un leurre. Des années après, le narrateur retourne dans la ville d'eaux et invoque, par intermittence, le souvenir nostalgique et lucide de sa relation avec Yvonne, des gens qui gravitaient autour d'eux, des extravagances de Meinthe, fantôme qui nous guide dans les rues aujourd'hui endormies... Mais ce qui ressurgit avant tout, c'est l'angoisse inexplicable de Victor, qu'il avait espéré apaiser en séjournant dans cette station thermale reculée, à proximité de la Suisse. Modiano s'appuie sur une langue fluide parsemée de petites formules moqueuses pour donner un tour grave et, malgré tout, léger à son roman. Grâce à cet équilibre habile, il esquisse les contours d'un homme en quête de repères pour supporter sa mémoire, tout comme il était, jeune, en quête d'immobilité et de racines. Et si les estivants de l'époque, ridicules et artificiels, ne sont pas tout à fait détestables, peut-être est-ce parce que le mystère qui plane donne un caractère intangible à cet été lointain.
Voyage de noces Modiano, Patrick
"Je suis tombé sur la vieille coupure de journal qui datait de l'hiver où Ingrid avait rencontré Rigaud. C'était Ingrid qui me l'avait donnée la dernière fois que je l'avais vue. Pendant le dîner, elle avait commencé à me parler de toute cette époque, et elle avait sorti de son sac un portefeuille en crocodile, et de ce portefeuille la coupure de journal soigneusement pliée, qu'elle avait gardée sur elle pendant toutes ces années. Je me souviens qu'elle s'était tue à ce moment-là et que son regard prenait une drôle d'expression, comme si elle voulait me transmettre un fardeau qui lui avait pesé depuis longtemps ou qu'elle devinait que moi aussi, plus tard, je partirais à sa recherche. C'était un tout petit entrefilet parmi les autres annonces, les demandes et les offres d'emplois, la rubrique des transactions immobilières et commerciales : On recherche une jeune fille, Ingrid Teyrsen, seize ans, 1,60 m, visage ovale, yeux gris, manteau sport brun, pull-over bleu clair, jupe et chapeau beiges, chaussures sport noires. Adresser toutes indications à M. Teyrsen, 39 bis boulevard Ornano, Paris."