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Élu pape en 1492 sous le nom d'Alexandre IV, Rodrigo
Borgia fut l'une des plus extraordinaires fripouilles d'une
époque qui, pourtant, n'en manqua pas.
Prologue
Quand la peste noire dévasta l'Europe, fauchant
près de la moitié de sa population, bien des
désespérés se détournèrent du ciel
pour contempler la terre. Les plus philosophes d'entre eux pour
dominer le monde physique, s'efforcer de découvrir les
secrets de l'existence, les grands mystères de la vie ;
les pauvres se contentant d'espérer surmonter leurs
souffrances.
Avant de servir Dieu, le nouveau souverain pontife cherche
d'abord à servir les siens, à commencer par ses
enfants, Juan, César, Geoffroi et Lucrèce.
Mais sa position dominante et son népotisme vont suscitent
des jalousies, qui bientôt deviennent meurtrières...
En cette Italie de la Renaissance, intrigues, complots et
empoisonnements ne sont pas des vains mots !
À la mort de Rodrigo, l'ennemi de la famille, le Cardinal
della Rovere lui succède. Et c'est tout le clan Borgia qui
se trouve en danger.
César, qui inspirera à Machiavel le personnage du
Prince, se réfugie à Naples avant de fuir en Espagne,
où il sera fait prisonnier. Mais, bien décidé
à retrouver le statut qui était le sien, il
s'évade et ourdit sa vengeance... Don Corleone n'avait
rien inventé !
Extrait
C'est ainsi que Dieu redescendit sur terre pour y devenir
l'Homme, et que la religion médiévale, perdant son
pouvoir, dut céder la place à l'étude des
grandes civilisations de l'Antiquité - romaine, grecque,
égyptienne. L'esprit des Croisades disparut ; les
héros de l'Olympe revinrent à la vie et se
livrèrent de nouvelles batailles. L'Homme se dressa contre
Dieu, la Raison triompha.
La philosophie, les arts, la médecine et la musique firent
beaucoup de progrès à cette époque ; la culture
s'épanouit dans toute sa splendeur. Il y eut toutefois un
prix à payer. Les vieilles lois furent violées avant
que les nouvelles soient rédigées. Passer de la
stricte adhésion à la parole de Dieu et de la
croyance en la damnation éternelle à l'adoration de
l'Homme, aux bienfaits du monde matériel, à
l'humanisme, fut en réalité une difficile transition.
À cette époque, Rome n'était pas une ville
sainte, mais un lieu sans foi ni loi. Les gens se faisaient
dépouiller en pleine rue, les maisons étaient
pillées, la prostitution florissait, les assassinats se
comptaient chaque semaine par centaines.
De surcroît, l'Italie telle que nous la connaissons
aujourd'hui n'existait pas encore. Des cités-États
indépendantes y étaient gouvernées par de
vieilles familles aristocratiques menées par un souverain,
un duc ou un archevêque. Chacun combattait son voisin, les
vainqueurs restaient toujours sur leurs gardes - car chaque
nouvelle conquête semblait à portée de main.
Les grandes puissances étrangères, soucieuses
d'accroître leur empire, envahirent ensuite le pays, que
la France et l'Espagne se disputèrent, tandis que les
«barbares» turcs, musulmans, menaçaient
l'Occident et la papauté.
L'Église et l'État se livraient une lutte
acharnée. La première avait connu la pantalonnade du
Grand Schisme, où l'on avait vu deux papes, installés
dans deux villes différentes, défendre chacun un
pouvoir et des revenus bien réduits. Désormais, il
n'y avait plus qu'un seul souverain pontife, installé
à Rome, et les princes de l'Église se remirent à
espérer. Plus forts que jamais, ils n'avaient qu'à
lutter contre le pouvoir temporel des rois et des aristocrates.
Mais l'Église catholique était en plein tumulte, car
elle connaissait les mêmes comportements
effrénés qu'ailleurs.
Les cardinaux n'hésitaient pas à envoyer leurs
serviteurs, armés d'arbalètes et de pierres,
combattre la jeunesse romaine dans les rues ; ils
fréquentaient les courtisanes, avaient de nombreuses
maîtresses, offraient et acceptaient des pots-de-vin. Le
haut clergé était tout prêt, contre espèces
sonnantes, à délivrer des indulgences, à
promulguer des bulles papales absolvant les plus terribles
crimes.
Plus d'un citoyen blasé disait volontiers qu'à Rome
tout était à vendre : l'argent pouvait acheter les
églises, les prêtres, et même le pardon de Dieu.
A de rares exceptions près, ceux qui devenaient
prêtres étaient des fils cadets - donc destinés
au sacerdoce dès leur naissance. Ils n'avaient pas de
véritable vocation religieuse, mais l'Église avait
encore le pouvoir de sacrer les rois, d'accorder bien des
bienfaits matériels. Chaque grande famille d'Italie
distribuait donc cadeaux et pots-de-vin pour voir ses fils
entrer dans le collège des cardinaux.
Telle fut la Renaissance - tels furent le cardinal Rodrigo
Borgia et sa famille.