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Firmin est un rat. Un rat non pas de bibliothèque
mais de librairie. Et cela change tout. Sam Savage, un tout
jeune écrivain à la soixantaine bien posée,
nous offre avec ce premier roman,Firmin, une histoire
amusante. Suivons les grignotages de ce rat peu
ordinaire. Firmin est le dernier rat d’une portée de
treize nés dans les sous-sols d’une librairie dans
le vieux quartier de Scollay Square à Boston. Dès
ses débuts, la vie n’est pas tendre avec lui. Il
est malingre car il a difficilement accès aux mamelles
de sa mère tant la concurrence est rude avec ses
frères et sœurs. Très vite pour compenser
cette différence de régime alimentaire, Firmin va
se tourner vers les livres et en grignoter quelques
pages. Il est né dans les confettis de Finnegans Wake. Joyce
était un Grand, peut-être même le plus Grand.
Je suis né, j’ai dormi et j’ai
tété sur la carcasse effeuillée du
chef-d’œuvre le moins lu au monde. Excusez-le du
peu ! Il ne faut pas croire que Sam Savage se contente de
raconter la vie banale de ce rongeur. Ce serait bien trop
simple. Sous sa plume, Firmin est intelligent, friand de
grande littérature et surtout, il a appris à lire
les livres qu’il grignote par petits bouts. Il devient
dévoreur de livres au propre comme au figuré.
« Un cas banal de biblioboulimie ». Très vite séparé du reste de sa famille qui
part par ruelles et autres immeubles vit sa vie, Firmin, peu
courageux et surtout pas téméraire, choisit de
rester dans sa librairie. Il en découvre tous les
recoins et également des caches où il peut suivre
la vie de la librairie tenue par Norman. Ce premier homme
rencontré par Firmin va devenir son idole. Mais peu
à peu, le rat va découvrir la vraie nature de
Norman. Ensuite, il rencontrera Jerry, écrivain
marginal, un peu alcoolique, bricoleur et nettement plus
sympathique. Jerry ne s’étonnera pas longtemps de
voir que Firmin sait lire. Si vous voulez être ami avec Firmin, ne lui parlez
surtout pas de Mickey ni de Little Stuart qu’il
déteste au plus haut point. En dehors des livres, Firmin a d’autres passions :
le cinéma qu’il découvre au Rialto theater.
Il ne rate aucune séance ou presque quand il sort de ses
lectures. Son autre idole chez les humains n’est autre
que Fred Astaire. Dans ses rêves les plus fous, il
s’incarne souvent en cet élégant danseur. Il
admire aussi Ginger Rogers. Et puis il a une collection de
Mignonnes, ses petites amies rêvées qui ressemblent
fort aux actrices plus ou moins déshabillées des
films qui passent après minuit. Firmin se rêve aussi en écrivain. Il a
déjà la première phrase de son roman…
mais la deuxième tarde à venir. Avec Firmin, Sam Savage nous raconte aussi le déclin
d’un vieux quartier de Boston pris dans les turbulences
des rénovations urbaines que connaît la ville en
ces années 60. Les promoteurs détruisent à
tout va sans tenir le moindre compte de l’histoire des
bâtiments qu’ils mettent à terre et en
poussière. Triste monde où le profit triomphe et
règne en maître. Cette histoire est écrite dans un style simple,
mélangeant allégresse et phases de melancholia.
L’auteur égraine quelques références
littéraires avec humour, les traits de cette maladie
incurable ou presque qu’est la biblioboulimie. Dans les premiers temps, mon appétit était
primitif, orgiaque, imprécis, goinfre – une
bouchée de Faulkner ou une bouchée de Flaubert, je
ne faisais pas la différence –, mais il ne
m’a pas fallu longtemps pour discerner quelques
nuances. Selon Firmin, les meilleurs livres à manger
sont les meilleurs à lire. Saviez-vous que chaque
ouvrage avait un goût propre ? Pour exemples, Jane Eyre
a un goût de laitue et Emily Post, la grande
prêtresse de l’étiquette et des convenances a
le goût du papier blanc très doux accroché au
mur juste à côté des toilettes. L’auteur
réglerait-il ses comptes ? Voici donc le portrait de Firmin, un rat peu ordinaire
avec lequel vous passerez un agréable moment. Bel hommage à la littérature et aux
lecteurs.