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À travers les sables brûlants du désert
égyptien, un homme s'avançait d'un pas égal,
volontaire et rude, comme si par cette marche, il eût
déjà défié l'ennemi vers lequel il
allait.
L'homme en marche dans le désert de sable ne
cherchait pas à ressusciter dans son esprit les villes
à jamais muettes, cadavres qui achevaient de pourrir
sous la terre. Son regard, son visage flamboyant, son
attitude, son pas qui talonnait rudement, son être
entier se tendait vers un point unique, vers on ne sait quoi
d'énorme, de monstrueux qui, à l'horizon dressait
dans le ciel pâle sa silhouette fantastique. Et ce
quelque chose, c'était le Sphinx. Et cet homme qui
allait au Sphinx, c'était Nostradamus. […]
Nostradamus arriva au Sphinx un peu avant minuit. Il
fixa un regard avide sur le colosse, à la lueur des
étoiles, distingua une porte de bronze placée entre
les jambes de devant. Les griffes titanesques semblaient
défendre aux hommes l'approche de cette porte. Mais
à quoi bon les griffes ? Nulle caravane faisant
halte au pied des Pyramides n'osait toucher à ce bronze.
Les bandits embusqués pour détrousser les voyageurs
s'écartaient avec respect de la porte magique. Dans les
tribus errantes, on se racontait que jadis, au fond des
siècles lointains, des hommes contemporains d'Isis, puis
de Platon, puis de Jésus-Christ avaient connu le secret
qui permettait d'ouvrir cette porte. Mais, depuis des
siècles, ce secret était perdu. Où allait-on
par là ? Qui le savait !… C'était
l'entrée du Mystère, voilà tout.
Nostradamus murmura :
— Dans quelques minutes ma vingt-quatrième
année sera accomplie. Voici le Sphinx. Et voici par
où je dois entrer dans le sein du Sphinx. Par là je
dois descendre jusqu'à l'Énigme et terrasser sa
volonté par ma volonté. Ô mon père, pour
obéir à l'ordre que tu m'as laissé en mourant,
j'ai abandonné le monde. Vengeance, conduis-moi !
Ô mon père, vous savez ce que j'ai souffert, et
quel formidable serment je me suis fait à moi-même,
et que, pour tenir ce serment, il me faut la puissance, toute
la richesse, toute la science... Ô mon père, me
voici devant la porte du Mystère. Que dois-je
faire ?
Un instant, il demeura en proie à une vertigineuse
rêverie, tout seul au plus profond de l'heure
mystérieuse, avec l'immensité derrière lui, et
le Sphinx devant lui… Tout à coup, il marcha
à la porte, et, du poing, frappa trois coups ; les
deux premiers très rapprochés, le troisième un
peu plus espacé. Dans le même instant la porte
s'ouvrit. Nostradamus se sentit frémir jusqu'à
l'âme ; mais aucune émotion ne se manifesta
sur son visage ; il entra sans hâte, sans crainte
apparente ; à peine eut-il franchi le seuil que
derrière lui la porte de bronze se referma avec un bruit
de tonnerre. Des ténèbres opaques
enveloppèrent Nostradamus, puis, tout à coup, une
aveuglante lumière l'inonda. Il regarda autour de lui,
et se vit dans une salle immense autour de laquelle
étaient symétriquement disposés des
sarcophages de pierre polie.
Nostradamus les compta rapidement ; il y avait
douze tombeaux. Il ne vit aucune issue à cette salle
taillée en plein roc. Il s'avança pourtant, et,
comme il arrivait au centre de cette crypte, il vit le
couvercle de granit de l'un des tombeaux se soulever
lentement, puis un autre, puis tous les douze. Les dalles
énormes se soulevaient, mues par une force invisible.
Quand elles furent debout, de l'une des tombes se leva un
être – homme ? spectre ? … Puis,
de la tombe voisine, puis des douze tombes béantes se
levèrent lentement des fantômes… "