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1491, Andalousie. Sous le règne implacable des rois
catholiques d'Espagne, il ne fait pas bon être juif ou
musulman... Condamnée pour sorcellerie, une femme se
tord dans les flammes du bûcher. Elle laisse à sa
fille, la rousse Myrin, une prophétie aux mots
énigmatiques et une pierre de lune aux étranges
pouvoirs... Traquée par le Grand Inquisiteur Jimenez et
ses hommes, Myrin se lance dans une fuite éperdue sur
les routes d'une Espagne ensanglantée par la
Reconquista, en compagnie de Pedro, un musulman converti, et
d'Isabeau, une jeune noble catholique promise au couvent. Au
terme de leur périlleux voyage : Grenade la
légendaire, dernière cité maure qui
résiste encore aux assauts des armées
chrétiennes...
Marianne Leconte, romancière et nouvelliste, a
également été l'éditrice de plusieurs
oeuvres majeures de la fantasy, comme Conan de Robert E.
Howard ou La Saga des Runes de Michael Moorcock. Elle a
écrit notamment L'Araignée de mer, La Comtesse de
la villa Palmyre et, plus récemment, Le Temple du
Dragon.
Prologue
DANS LE GRAND LIT À BALDAQUIN, une femme hurlait. Ses
cris couvraient les conseils angoissés des servantes qui
l'entouraient. Le visage brillant de sueur et de larmes,
déformé par les efforts douloureux qu'elle faisait
depuis des heures pour expulser son bébé, dona
Maria de Guzman di Como, marquise de Jerez, sentait ses
forces l'abandonner. Épuisée par ses souffrances,
elle envisagea un instant de partir ; se laisser glisser, en
finir avec cette épreuve, trouver la paix et rejoindre
le Seigneur dans un ciel sans nuage. Mais la vision de sa
petite dernière, une blondinette de cinq ans aux yeux
bleus pétillants de malice, lui redonna courage. Elle
fit un effort pour supporter la brûlure atroce qui
enflammait à nouveau ses reins et ses entrailles et
tourna la tête vers son mari. L'Italien se tenait en
retrait, à demi dissimulé derrière la haute
silhouette blanche et noire de son directeur de conscience.
Le désir de vivre de dona Maria était si puissant
que sa foi vacilla. Oubliant les lois édictées par
les Cortes, bravant les interdits de la Sainte Inquisition,
elle supplia une fois de plus son mari de faire venir
Tchalaï de Luz.
Marianne Leconte, romancière et nouvelliste, a
également été l'éditrice de plusieurs
oeuvres majeures de la fantasy, comme Conan de Robert E.
Howard ou La Saga des Runes de Michael Moorcock. Elle a
écrit notamment L'Araignée de mer, La Comtesse de
la villa Palmyre et, plus récemment, Le Temple du
Dragon.
Extrait
Malgré la faiblesse de sa voix, toutes les
personnes présentes dans la grande chambre l'entendirent
et frémirent. La femme penchée sur son bas-ventre
recouvert d'un drap blanc gorgé de sang se signa en
marmonnant une prière, tandis qu'une jeune esclave lui
tamponnait le front et les joues avec un linge mouillé.
Impavide, la fille accomplissait sa tâche en silence,
mais ses gestes étaient empreints de douceur.
Sandro di Como, marquis de Jerez grâce à son
mariage, fit quelques pas vers le lit, contempla les traits
livides de son épouse, ses cheveux trempés, son
regard clair embué de larmes. Il maudit en silence le
destin qui avait chassé sa famille de Lombardie et le
Saint-Père de Rome. Le retour de la papauté en
Avignon avait décuplé la puissance de l'Inquisition
et personne n'était à l'abri de ses flammes. Depuis
l'élection de Tomas de Torquemada au trône de
Saint-Pierre, c'était pire. Honteux de sa propre peur,
le maître des lieux se tourna vers l'homme de Dieu comme
pour lui demander par avance son pardon, puis d'une voix
forte donna l'ordre que l'on allât chercher à
cheval le médecin juif dans la Juderia.
En entendant ces mots, le Grand Inquisiteur poussa un
soupir de découragement et se signa. Confrontée
à la souffrance et à la mort, l'âme
faiblissait et le diable, à l'affût, en profitait.
Au lieu de s'en remettre à la volonté divine, sa
protégée allait se souiller au contact d'une
hérétique... Mais cet acte répréhensible
pourrait avoir des conséquences intéressantes. Dans
la décision prise par un époux
désespéré, Alonso Jimenez voyait le doigt de
Dieu. Le Très-Haut lui montrait la voie à suivre et
l'encourageait à accomplir sa mission d'un esprit ferme.
Plein de ferveur et d'humilité, il murmura la devise des
Dominicains, veritas, puis rajusta son manteau noir sur ses
épaules, saisit le chapelet qui pendait à sa
ceinture de cuir et pria pour l'âme de la
pécheresse en égrainant les perles en bois de son
rosaire.
Biographie de l'auteur