Collection: Livre 11 dans la collection Les aventures d'Arsène Lupin
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— Vous
êtes là, Rossigny?
— Je suis
là, fit une voix qui montait des massifs entassés
au pied du château.
Se penchant un peu,
elle vit un homme assez gros qui levait vers elle une figure
épaisse, rouge, encadrée d’un collier de
barbe trop blonde.
— Eh bien?
dit-il.
— Eh bien,
hier soir, grande discussion avec mon oncle et ma tante. Ils
refusent décidément de signer la transaction dont
mon notaire leur avait envoyé le projet et de me rendre
la dot que mon mari a dissipée avant son
internement.
— Votre
oncle, qui avait voulu ce mariage, est pourtant responsable,
d’après les termes du contrat.
—
N’importe. Je vous dis qu’il refuse…
—
Alors!
— Alors
êtes-vous toujours résolu à m’enlever?
demanda-t-elle en riant.
— Plus que
jamais.
— En tout
bien tout honneur, ne l’oubliez pas!
— Tout ce que
vous voudrez. Vous savez bien que je suis fou de
vous.
— C’est
que, par malheur, je ne suis pas folle de vous.
— Je ne vous
demande pas d’être folle de moi, mais simplement
de m’aimer un peu.
— Un peu?
Vous êtes beaucoup trop exigeant.
— En ce cas,
pourquoi m’avoir choisi?
— Le hasard.
Je m’ennuyais… Ma vie manquait
d’imprévu… Alors je me risque… Tenez,
voici mes bagages.
Elle laissa glisser
d’énormes sacs de cuir que Rossigny reçut
dans ses bras.
— Le sort en
est jeté, murmura-t-elle. Allez m’attendre avec
votre auto au carrefour de l’If. Moi, j’irai
à cheval.
— Fichtre! Je
ne peux pourtant pas enlever votre cheval.
— Il
reviendra tout seul.
—
Parfait!… Ah! à propos…
— Qu’y
a-t-il?
—
Qu’est-ce donc que ce prince Rénine qui est
là depuis trois jours et que personne ne
connaît?
— Je ne sais
pas. Mon oncle l’a rencontré à la chasse,
chez des amis, et l’a invité.
— Vous lui
plaisez beaucoup. Hier vous avez fait une grande promenade
avec lui. C’est un homme qui ne me revient
pas.
— Dans deux
heures, j’aurai quitté le château en votre
compagnie. C’est un scandale qui refroidira
probablement Serge Rénine. Et puis assez causé.
Nous n’avons pas de temps à perdre.
Durant quelques
minutes, elle regarda le gros Rossigny qui, pliant sous le
poids des sacs, s’éloignait à l’abri
d’une allée déserte, puis elle referma la
fenêtre.
Dehors, loin dans
le parc, une fanfare de cors sonnait le réveil. La meute
éclatait en aboiements furieux. C’était
l’ouverture, ce matin-là, au château de La
Marèze, où tous les ans, vers le début de
septembre, le comte d’ Aigleroche, grand chasseur
devant l’Éternel, et la comtesse réunissaient
quelques amis et les châtelains des
environs.
Hortense acheva
lentement sa toilette, revêtit une amazone qui dessinait
sa taille souple, se coiffa d’un feutre dont le large
bord encadrait son beau visage aux cheveux roux, et
s’assit devant son secrétaire, où elle
écrivit à son oncle, M. d’ Aigleroche, une
lettre d’adieu qui devait être remise le soir.
Lettre difficile qu’elle recommença plusieurs fois
et à laquelle, finalement, elle
renonça.
«Je lui
écrirai plus tard, se disait-elle, quand sa colère
aura passé.»
Et elle se rendit
dans la haute salle à manger.
D’énormes
bûches flambaient au creux de l’âtre. Des
panoplies de fusils et de carabines ornaient les murs. De
toutes parts, les invités affluaient et venaient serrer
la main du comte d’ Aigleroche, un de ces types de
gentilshommes campagnards,