1280 âmes Pouy, Jean Bernard
Dans ce roman Jean-Bernard Pouy sedonne complètement à ce qui sous-tend tous ses autres romans etnouvelles : l’exercice de style. Exercice de style etrecherche, car il ne suffit pas d’essayerd’épater la galerie, il faut être lisible. Jean-Bernard Pouyréussit le tour de force de nous emmener sur les traces d’unécrivain sans le pasticher, revisitant son œuvre sans la piller.Mais voyons plutôt. En mettant en scène un personnage nouveau dedétective (pas tout à fait nouveau puisque Lawrence Block avecBernie Rhodenbarr nous en propose un particulièrement savoureux maisil ne faut pas oublier que son état de libraire n’est qu’unefaçade de même que celui inventé par ou encore dernièrement parAlix Clémence dont le bouquiniste est spécialisé dans les romanslibertins) du nom de Pierre de Gondol, bouquiniste érudit.D’ailleurs Pierre de Gondol s’amuse en répondant aux questionsles plus diverses de ses clients, soit en retrouvant l’auteur d’unecitation, soit en affabulant sur des biographies les plus saugrenues.Justement l’un de ses clients lui demande d’enquêter sur ladisparition de cinq personnages entre le roman original de JimThompson Pop 1280 et la traduction française 1275âmes. Une enquête qu’il prend au sérieux en se rendant à laBilipo, reçu par “ des dames d’une gentillesse exquise, unpeu anglo-saxonnes dans l’approche et le maintien ” et enétudiant les thèses de Michael MacCauley ou les articles déjàconsacrés à ce phénomène de tour de passe-passe, hommage auregretté Pierre Bertin, et parus dans 813. Ainsi que des passagesoccultés dans les diverses éditions et rééditions et qui donnentparfois un tout autre sens au récit ou lui apportent une joyeusenote farfelue. Et tout en se délectant à la vision de rediffusionsde films adaptés de romans de Thompson, Pierre de Gondol oppose lecinéma au livre, l’avantage étant à ce dernier. Mais le mieuxest peut-être, sûrement même, de lire ce roman jubilatoire endiable qui nous ouvre bien des horizons, et dont l’épilogue estpour le moins iconoclaste. Si les autres auteurs de cette nouvellesérie se comportent dans la lignée de Pouy, nul doute que Pierre deGondol pourrait supplanter Le Poulpe. C’est ce que je pensais enécrivant cette chronique lors de la parution du roman,malheureusement ce ne fut pas le cas malgré les textes de qualitéqui furent publiés dans cette collection éphémère. Pouy ne nousmène pas en bateau, mais qu’est-ce qu’on se gondole.
54 x 13 Pouy, Jean Bernard
54x13 au vélo, c'est le rapport entrele plateau avant (54 dents) et le pignon arrière (13 dents).Jean-Bernard Pouy, surtout connu commeauteur de romans policiers, s’offre ici une échappée sur lesroutes du Tour de France, celui de 1995 pour être précis. Uneépreuve marquée par la mort tragique de Fabio Casartelli dans ladescente du Portet-d'Aspet deux jours plus tôt, l'étape dulendemain neutralisée en hommage au sportif italien, c'est donc lorsde la dix-septième, Pau - Bordeaux, que Pouy décide de "truquer"l'histoire (le vainqueur dans la préfecture de la Gironde cetteannée-là étant en réalité Erik Zabel). Lilian Fauger, jeunecoureur originaire de Dunkerque et issu d'une obscure formation quine compte plus que trois éléments à ce moment de l’épreuvedécide de jouer la fille de l'air, pour cela il n'hésite pas àmentir, faisant croire que sa famille l'attend sur le bord de laroute pour bénéficier d'un billet de sortie. Commence alors un longmonologue intérieur, l'écrivain nous fait partager un privilègeque la télévision ne pourra jamais nous accorder : suivre lespensées du cycliste durant toute son échappée, et sur ce point laperformance de Pouy est une réussite. On ne s'ennuie jamais, lesuspense est ménagé jusqu'à la flamme rouge (pour les lecteursignorants de la chose vélocipédique, la flamme rouge indique ledernier kilomètre), son personnage tient la est bien construit et lecadre reste cohérent : le coureur solitaire, le peloton à sestrousses, la caravane publicitaire, les médias, le dopage, le fric,les coups tordus d’un monde impitoyable !...Et un final étonnant... Du grandPOUY!!!
La belle de Fontenay Pouy, Jean Bernard
La Belle de Fontenay, c'est une variété de patates, que l'on connaît aussi sous le nom de Hénaut. Verte, délicieuse, très ferme à la vapeur, se récolte à partir de juin. Mais cependant très fragile, nécessite du boulot. Voyez, l'ignorance est déjà chose du passé. La raison de cette introduction potagère, c'est la passion de Enric Jovillard, le narrateur de ce livre. Enric a la soixantaine, célibataire, pas d'enfants, et jardinier compréhensif, sensible et attentionné. Fils de révolutionnaires espagnols, il a été naturalisé français durant sa jeunesse et a retenu de ses parents en prônant l'anarchie. Pas l'anarchie des punks bidon, la vraie anarchie, l'anarchie pour La Cause, celle qui était prête à tuer, en 68. Jovillard a mangé sa part de coups sur la gueule, a toujours servi la contrepartie à ces coups, a fait de la prison, a appris à se battre, à manier les armes. Et une balle qui lui effleura la tête l'a laissé sourd-muet, maintenant étranger au monde des « zorros » (oraux) et de la musique. Il n'a jamais appris le langage des signes et ne communique, uniquement lorsque c'est nécessaire, que par petits papiers, des mots griffonnés dans un carnet, sur un papier qui traînait là, ou encore sur la nappe du restaurant, qui finit inévitablement noircie de pattes de mouche. Et Enric ne supporte pas les fautes d'orthographe.
La chasse au tatou dans la pampa argentine Pouy, Jean Bernard
Un choix de nouvelles très éclectiques. Une écriture sans fioritures, à l'ironie mordante, un goût prononcé pour les descriptions pointues et les dérapages poétiques contrôlés qui abordent de façon prégnante l'immédiateté du malheur. Trophée de la nouvelle 1993 par l'Association 813.
Larchmütz 5632 Pouy, Jean Bernard
Benno et Adrien sont deux anciens combattants révolutionnaires, en sommeil depuis vingt-cinq ans. Lorsque l'Organisation les réactive, ils quittent à contrecoeur leur ferme de Bretagne et abandonnent Momone sans savoir qu'elle est la seule vache télépathe au monde. Ils rejoignent Paris par des chemins détournés pour se lancer dans un nouveau combat : "redonner un sens à l'Histoire en organisant un contre-pouvoir moral doté d'une justice armée". Mais les temps ont changé, et lorsqu'on leur demande de se transformer en tueurs internationaux, ils abandonnent la sacro-sainte discipline pour tenter de savoir qui les manipule. Sous des aspects débonnaires (servis par la vache télépathe), Jean-Bernard Pouy analyse avec lucidité ce qu'il est advenu des anciens révolutionnaires de 1968. A travers les remarques sarcastiques de Benno et Adrien, il pose un regard critique sur l'évolution de la société actuelle et livre un roman pessimiste mais non dénué d'humour. --
Les roubignoles du destin Pouy, Jean Bernard
Le destin, de ses gros doigts aussi boudinés que malhabiles, frappe, au hasard, un vieux con, une petite cavalière, un poète du désert, un sportif en pleine finale, le Pape ou le dieu vivant du saxophone ténor... Et c'est alors le drame ou l'intense rigolade, ce qui, en y regardant de près, est la même chose, c'est-à-dire l'insensée Douleur du Monde. Douze nouvelles pour faire avec l'auteur le tour de son talent aux multiples facettes.
Nus Pouy, Jean Bernard
Décidé à faire passer la contre-société alternative à la vitesse supérieure, le collectif libertaire " ZO " organise son " université d'été " dans un camp naturiste. Parce qu'à poil on ne peut plus rien cacher ! Au programme, donc : plage, surf, amours libres et... prises de bec. La situation risque de virer au problématique quand la bande apprend que Rosa, une gentille retraitée, a été tuée. En aidant leur ami Harrar à régler les détails de la succession, ils découvrent l'histoire extraordinaire de la vieille Espagnole... Il s'agirait de la propre fille du célèbre combattant républicain Durutti ! Ce n'est plus Rosa, c'est une icône qu'on a tuée ! Les voilà plongés jusqu'au cou dans un intrigue policière dont ils se seraient bien passés... Calo, Laurence, Papi, Brett, Sonia et les autres affrontent leurs contradictions libertaires : que faire du coupable quand ils l'auront trouvé ? Peut-on mentir, peut-on trahir pour que justice soit faite ?
Plein tarif Pouy, Jean Bernard
Une bande de clochards regroupés pour l’hiver par la SNCF dans une gare abandonnée. Cela suffit à Pouy pour nous emmener dans une furieuse bataille où l’on découvre les hommes et leurs contradictions, leurs rêves aussi, dans l’action. Le style, entre dentelle poétique et calembours, atteints des sommets.
RN 86 Pouy, Jean Bernard
Lucie avait disparu un mois entier sans donner d'explication à Léonard. Et il n'avait pas eu le temps de la convaincre de parler puisqu'elle était morte peu après dans un accident de voiture. Alors, ce vide insupportable, Léonard entreprend de le combler. A l'aide du seul lien qui le rattache à ce mystère : une carte postale du pont du Gard. Mais dès qu'il franchit le pont, les fantômes viennent à sa rencontre...
Train perdu wagon mort Pouy, Jean Bernard
Au cœur de la nuit, un wagon se détache d'un train-couchettes et s'arrête soudain. D'abord persuadés qu'il s'agit d'une panne, les occupants découvrent qu'ils sont perdus au milieu de nulle part. Abandonnés, oubliés par les secours, certains partent en éclaireurs et disparaissent. Leurs cadavres sont retrouvés, dans une ville déserte et en ruine. La terreur s'empare alors des survivants...
Une brève histoire du roman noir Pouy, Jean Bernard
Qui l'eut cru ? Jean-Bernard Pouyhistorien !...Et pourtant, à sa manière, revendiquée incomplète et non exhaustive, c'est bience costume-là qu'il endosse notre JBP national, le temps de dresser le portraitd'un genre qu'il connaît bien pour le pratiquer depuis maintenant quelquesannées. Dans cette collection dirigée par Jean-Claude Béhar, « un auteurdessine en neuf chapitres l'Histoire et le portrait de son sujet. Neuf momentscomme des ellipses dans l'espace et le temps… d'un instant à l'autre. »Alors Jean-Bernard Pouy s'atèle à la tâche et décline en guise de premierchapitre une entrée en matière qui recentre le sujet en éliminant d'office deson propos le roman à énigme, le thriller et le roman policier procédural oud'enquête, pour en venir à l'essentiel : le roman noir et ceux qu'ilconsidère comme proéminents dans ce continent littéraire.Ainsi s'égrènent, sous la plume savoureuse de JBP, fort de ce"franc-écrire" qu'on lui connaît, la revue de détail des troupes enprésence. On notera les aiguilleurs (Hammet, Chandler, Manchette) ;les forcenés (Simenon, Ellroy, Westlake) ; les pessimistes(Goodis, Thompson, Jonquet, Cook) ; les allumés (Crumley, Williams, Crews) ;les étoiles filantes (Grubb, Loughran, Crabb) ; les intellos(Queneau, Vian, Capote) ; et l'avenir (Garnier, Férey).Facétieux, comme toujours, son neuvième chapitre prendra la forme d'unenouvelle au titre évocateur : Sauvons un Arbre, Tuons unRomancier !Au final, ce qui transpire de ce court essai, c'est bien la passion de sonauteur pour le genre qu'il pratique et affectionne, passion communicatricepuisqu'à le lire, on en vient à reconsidérer les manques flagrants des rayonsde sa propre bibliothèque et combien il conviendrait de les combler.Jean-Bernard Pouy donne foutrement envie de se (re)plonger dans certaines (deses, ou ces) lectures (la brève bibliographie en fin de volume est à cet effetla bienvenue).http://www.polarnoir.fr